Affaire Théo: à la barre, le policier défend son coup de matraque

Au procès Théo, du nom de ce jeune Noir qu'une interpellation en février 2017 à Aulnay-sous-Bois a laissé infirme à vie, le principal accusé s'est défendu ce mercredi 17 janvier d'avoir porté un coup « démesuré ».

Le gardien de la paix Marc-Antoine Castelain devant la cour d'assises où il est jugé avec deux collègues pour « violences volontaires », le 9 janvier 2024. AFP - BENOIT PEYRUCQ

Par : RFI Suivre

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Lorsque Marc-Antoine Castelain intervient le 2 février à Aulnay-sous-Bois pour participer au contrôle d'un groupe de jeunes dans la cité des 3 000, il a déjà son bâton télescopique de défense à la main. Le ton monte aussitôt entre les protagonistes.

« 

Tout va très vite. Une échauffourée rapide », décrit à la barre le gardien de la paix de 34 ans. Théo Luhaka « m'attrape au niveau du col, de manière virulente », poursuit-il, sans parvenir à justifier le comportement de la victime.

Son collègue procède alors à l'interpellation du jeune homme, athlétique. Il l'amène au sol et chute. « Je viens porter secours », explique le principal accusé, petit gabarit aux lunettes fines. Avec sa matraque, il « tape au niveau des bras », « sur les masses musculaires » puis sur « le haut de la cuisse pour le faire fléchir ». « Vous avez l'habitude de viser le muscle fessier ? », l'interroge la présidente de la cour. « C'est un geste que je n'ai pas l'habitude de faire (...) appris à l'école. Il est plus grand que moi », se justifie l'agent, qui affiche une taille de 1,75 m et précise qu'il ne fait « pas forcément de la musculation ».

« Quelque chose qui me hante »

Son « coup d'estoc », plus précisément son coup avec la pointe de sa matraque, provoque une rupture du sphincter de Théo Luhaka. La plaie est de dix centimètres de profondeur. « Tous les jours, je pense à la blessure de M. Luhaka, c'est quelque chose qui me hante », confie l'agent, jugé avec deux de ses collègues. « J'ai prié pour qu'il s'en remette. J'ai causé une blessure qui est désolante sans intention de la faire ». Ce n'est « pas un coup démesuré », poursuit le fonctionnaire, muté depuis à un poste administratif dans un commissariat du Nord, d'où il est originaire.

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Une fois interpellé et menotté, Théo Luhaka prend « une gifle ». La scène est captée par le système de vidéosurveillance de la ville. « Un geste pas réglementaire, pas déontologique », admet le fonctionnaire devant la cour. Et « sous l'effet tunnel », le « stress », pour « sortir » son collègue, il met aussi un coup avec la pointe de sa matraque sur la tête de la victime.

Finalement le jeune homme, 22 ans à l'époque, est transporté au commissariat pour y être placé en garde à vue. Il a le visage, le t-shirt et les fesses en sang. La banquette arrière du véhicule de police est aussi tâchée. Il a des difficultés à s'asseoir. « Je n'ai pas remarqué. Je n'ai pas perçu le fait qu'il ait mal quelque part. Jamais il n'exprime cette douleur », dit l'accusé, qui risque jusqu'à quinze ans de prison.

Malgré deux opérations chirurgicales, Théo Luhaka souffre toujours d'incontinence.

(Avec AFP)

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